LES ÉCHOS – « C’est qui le Patron ?! » tend la main à la grande distribution

 18/07/2018

« La coopérative souhaite commercialiser des produits labellisés en partenariat avec d’autres marques. Elle mise sur sa communication pour conserver la confiance des consommateurs.

 

Vous l’avez sans doute déjà aperçu dans les rayons de vos supermarchés habituels. Tout de bleu vêtu, le produit phare de « La Marque du Consommateur » fait de l’œil aux industriels de l’agroalimentaire. Depuis le lancement de sa brique de lait en octobre 2016, « C’est qui le Patron ?! » a fait du chemin. 63 millions de litres de lait vendus plus tard et un succès au-delà des espérances, la coopérative change de stratégie.

 

Après l’arrivée dans les rayons de produits de tous les jours comme le beurre, les pâtes ou le jus de pomme, « C’est qui le Patron ?! » va se concentrer sur l’attribution de son label. Elle devrait mettre le pied sur l’accélérateur avant l’automne et appeler les consommateurs à décider du cahier des charges de nouveaux produits via des questionnaires en ligne.

Cap sur les labels

Sa démarche est la même qu’à ses débuts, à la différence que ces articles ne feront pas partie de sa propre gamme. D’autres marques devraient profiter de la confiance que portent les clients de « C’est qui le Patron ?! ». De nombreux acteurs, dont des distributeurs, seraient intéressés par cette offre de labellisation. Le géant de l’agroalimentaire Danone serait d’ailleurs en discussion pour nouer ce type de partenariat.

 

« Une occasion extraordinaire, à un moment où toutes les marques et les fabricants n’ont pas notre crédibilité », estime Nicolas Chabanne, cofondateur de la coopérative avec Laurent Pasquier. Pour Frédéric Nicolas, de l’institut d’études de la consommation IRI, « il y a un risque qu’ils perdent un petit peu de leur essence, mais ce qui fera la différence, c’est la performance du produit », tempère-t-il.

 

En 18 mois d’existence, la marque des consommateurs déclare un chiffre d’affaires cumulé de plus de 3 millions d’euros grâce à ses commissions. Pour les produits qu’elle commercialise elle-même, c’est 5 % et seulement 2 % pour ceux qu’elle se contente de labelliser. C’est le cas pour certains laits commercialisés par la marque de distributeur Monoprix depuis le début de l’année et pour les desserts « votre yaourt nature » de la MDD Carrefour arrivés en juin.

 

Pour ces premières mises en ventes sous labels, les consommateurs n’ont pas été consultés. « Un tour de chauffe… » et la faute à un manque de temps face « à ses opportunités » explique l’entrepreneur qui promet qu’ils reprendront la main pour la suite.

Faire parler les consommateurs

Si la jeune pousse aspire toujours à mobiliser les clients, elle va structurer son activité autour d’une agence de « savoir-faire ». Elle sera destinée à recueillir les fonds des futures sociétés partenaires. D’après Nicolas Chabanne, « les revenus dégagés vont – entre autres – financer le processus de contrôle et certification des consommateurs », ainsi que des outils pour les adeptes de la marque. Des tournages d’interventions « des consos » sont prévus afin qu’ils puissent témoigner du respect des cahiers des charges.

Une réappropriation de l’équitable

« Apparue en pleine crise du lait, la coopérative réinvente le commerce équitable à sa manière », souligne Julie Maisonhaute, de l’association Commerce Équitable France. Et pour cause, en dehors du lait, les produits estampillés « C’est qui le Patron ?! » ne répondent pas exactement à sa définition dans la loi française. Le commerce équitable « a pour objet d’assurer le progrès économique et social des travailleurs » à travers le respect de plusieurs conditions, dont « l’octroi par l’acheteur d’un montant supplémentaire obligatoire destiné aux projets collectifs ». Cela n’empêche pas la coopérative d’user du vocabulaire de l’achat responsable, quitte à entretenir un certain flou. »

LÉA MÉNARD

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