LE PARISIEN – Le beurre C’est qui le patron ? ! va voir son prix s’envoler, avec l’accord des clients

« Les clients de cette coopérative qui veut mieux rémunérer les producteurs ont voté en majorité pour une hausse destinée à pérenniser la production.

 À la rentrée, le prix de la plaquette de 250 g devrait passer de 2,20 euros à 2,94 euros, soit une hausse de… 33 % .
À la rentrée, le prix de la plaquette de 250 g devrait passer de 2,20 euros à 2,94 euros, soit une hausse de… 33 % . LP/ Aurélie Ladet
Le 19/07/2019

Lancé en septembre 2017, le beurre bio estampillé C’est qui le patron ? ! est désormais le plus vendu de France, avec un chiffre d’affaires annuel de 850 000 euros par an. À la rentrée, le prix de la plaquette de 250 g devrait passer de 2,20 euros à 2,94 euros, soit une sacrée envolée de… 33 % ! Mais, pour une fois, cette hausse, ne se fait pas contre les clients mais avec eux !

En effet, c’est suite à la consultation en ligne des 9 000 sociétaires de la coopérative de consommateurs « C’est qui le patron ? ! » que cette décision a été prise. Les 2 300 votants ont opté à 88 % pour cette future hausse tarifaire. « Ce vote est inédit dans le monde de l’agroalimentaire : c’est la première fois que le sort d’un produit est mis entre les mains des consommateurs », décrypte Nicolas Chabanne, le médiatique patron de cette marque atypique née en 2016.

Pour résumer, les sociétaires avaient le choix entre deux options : voter « oui » à cette hausse, et être certains que le beurre serait à terme toujours présent dans les hypermarchés – bien que probablement impacté par ce coup de massue financier. Ou voter « non », mais risquer alors de voir ce produit disparaître des rayons, faute d’équation économique durable.

15 centimes par plaquette pour la conversion au bio

Depuis le lancement de ce beurre, en effet, la part allouée à C’est qui le patron ? ! – 5 centimes par plaquette – est restée stable. Idem pour la part versée au profit des agriculteurs en train de se convertir au bio – 15 centimes par plaquette, soit plus d’1 million d’euros d’aides délivré à ce jour -. C’est notamment pour pouvoir maintenir ces aides aux agriculteurs que les sociétaires ont voté la poursuite de la production. Les producteurs de lait bio, eux, sont rémunérés 0,466 euro par litre, contre 0,45 euro prévus il y a deux ans.

En revanche, le partenaire industriel, la coopérative Sodiaal, crie au loup depuis plusieurs mois : le lait écrémé – qui reste une fois la crème du lait utilisée pour faire du beurre -, séché et transformé en poudre de lait, n’atteint pas ses objectifs : alors qu’au début du projet, Sodiaal tablait sur un rendement de 3 300 euros par tonne de poudre de lait bio, elle n’est finalement valorisée qu’à hauteur de 1 900 euros la tonne.

« Nos pertes sont trop élevées », confirme la coopérative. « Pour que notre beurre soit durable, chaque acteur doit être correctement rémunéré », insiste de son côté Nicolas Chabanne, qui redoutait clairement, en cas de vote négatif de ses actionnaires, que Sodiaal ne cesse purement et simplement de produire ce beurre bio.

Une hausse annuelle inférieure à 8 euros

Pour le fondateur de C’est qui le patron ? !, ce changement tarifaire signe par ailleurs le retour à une certaine normalité : « actuellement, comme on est de loin le beurre bio le moins cher, on tire tous les produits bios vers le bas, ce qui pénalise les producteurs bios », estime-t-il. « Alors que le beurre C’est qui le patron ? ! était moins cher que les marques distributeurs, il se positionnera désormais entre ces dernières et les beurres de marque, ce qui est bien plus logique », abonde-t-on chez Sodiaal.

Les consommateurs, eux, risquent-ils de se détourner de ce produit désormais phare ? Pour Nicolas Chabanne, le risque est minime. « En moyenne, les Français consomment onze plaquettes de beurre par an, la hausse moyenne sera donc inférieure à 8 euros par an », calcule-t-il.

30 produits élus par les consommateurs

Tout commence quand Nicolas Chabanne, alors investi dans « Les gueules cassées », ces fruits et légumes moches considérés comme invendables, constate en achetant son litre de lait que celui-ci est vendu en dessous de son prix de revient. Il a l’intuition que les consommateurs seraient peut-être prêts à payer davantage, afin d’assurer une juste rémunération aux producteurs.

Après une série de consultations, le lait C’est qui le patron ? ! est lancé, fin 2016, sous les gloussements de la concurrence… Sans publicité, ni commerciaux en magasins, il s’en est déjà écoulé 129 millions de litres, et est désormais présent dans 17% des foyers français.

Sur le même modèle ont été lancés 30 produits dont le beurre bio, les oeufs équitables, le steak haché, le jus de pomme, le chocolat et le miel bio. Au total, plus de 11 millions de gens achètent régulièrement des produits C’est qui l’patron, avec un taux de réachat très élevé de 54%. Arriveront bientôt dans les rayons le jambon, la confiture et surtout les yaourts. »

Odile PLICHON

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