16/02/2019
« Entre les labels certifiés, les labels bio et ceux financés par des marques, il est souvent difficile de se repérer en supermarché. Suivez le guide des petites étiquettes.
En pleine réflexion métaphysique devant le rayon volaille de votre supermarché, vous hésitez entre cette cuisse de poulet AOP ou sa voisine qui vous semble un peu plus dodue, prometteuse avec son Label Rouge ou encore cette troisième dans sa barquette bleue avec son étiquette « Saveur de l’année 2018 » qui fait saliver… Alimentaire, mon cher Watson ?
Quels sont les différences entre AOP, AOC et IGP ?
Ces trois labels sont décernés par l’INAO, Institut National de l’Origine et de la Qualité. Un cahier des charges est mis en place avec les producteurs : l’INAO doit s’assurer qu’il soit respecté (avec des contrôles réguliers) et qu’il n’y ait aucune fraude. L’AOC, l’appellation d’origine contrôlée, est l’ancêtre de l’AOP, appellation d’origine protégée qui a pris ce nom suite au passage du label à l’échelle l’européenne. AOC ou AOP garantissent que le produit est fait dans une région donnée et transformé sur place. Ce label met en valeur la spécificité du produit et son mode de production, comme le camembert de Normandie, avec un cahier des charges spécifique (région délimitée, lait issu à 50 % de vaches normandes).
L’IGP, indication géographique protégée, est moins restrictive : elle nécessite seulement une étape de production dans la zone d’indication géographique protégée. Il s’agit par exemple du jambon de Bayonne, salé dans la région de l’Adour mais dont les porcs peuvent venir d’une zone comprenant vingt-deux département du Sud-Ouest de la France.
Dans les deux cas, l’appellation assure un certain savoir-faire : cela dit cela ne veut en aucun cas dire que les produits sont artisanaux ou bons pour la santé : un fromage AOP peut être industriel, comme le Roquefort Société de Lactalis.
Les labels bio
Le plus connu est le label bio européen avec son « Eurofeuille » (une petite feuille verte), lui aussi délivré par l’INAO. L’ancienne version était le label AB français. Ce sont des produits quasiment sans OGM (autorisation de traces d’OGM à 0,9 %), ni pesticides, ni engrais chimiques. Pour la viande, cela induit des modes d’élevage plus respectueux. Pour autant, cela ne garantit pas d’acheter du local, ni même des produits fabriqués dans l’Union Européenne.
Bon nombre de producteurs ne trouvent pas ce label assez engagé et en ont créé de plus exigeants. « Bio Cohérence » reprend ainsi les normes de l’ancien label français, Bio, plus strictes que celles de l’actuel label européen. Les produits doivent être cultivés, produits et transformés en France et sans aucune trace d’OGM. On le trouve notamment dans le réseau Biocoop.
Créé en 1982, Démeter, souvent utilisé par les producteurs de vins, va également plus loin dans le respect de l’environnement : il exige, en plus, une production en biodynamie, soit tout un travail sur le respect des sols et de la terre avec très peu d’intrants.
Label Rouge, label « Bleu-Blanc-Cœur » et « C’est qui le Patron ?! »
Parmi les autres labels, Label Rouge, porté par l’INAO, que l’on trouve beaucoup au rayon volailles s’obtient après un test organoleptique comparatif et selon un cahier des charges comprenant des conditions de production « supérieures ». Mais les produits peuvent être issus de partout dans le monde. Ce label un peu flou devrait se renforcer ces prochaines années avec un cahier des charges plus ambitieux.
Au rayon viande, on trouve également le label indépendant « Bleu-Blanc-Cœur », né en 2000 et monté par un agriculteur et un agronome : il exige une alimentation spécifique des animaux, notamment l’introduction du lin, du colza et de la luzerne, riches en oméga-3 et reconnus pour améliorer la qualité de la viande.
Plus engagé auprès des producteurs, « C’est qui le Patron ?! » est une marque créée pour les consommateurs par Nicolas Chabanne, à l’origine de la campagne pour les fruits et légumes moches. Elle leur propose de voter pour le prix de chaque produit et vend déjà en supermarché lait, beurre bio et pizza.
À fuir : les jurys de consommateurs
Les étiquettes « Élu produit de l’année » ou « Saveurs de l’année » ne possèdent aucun cahier des charges. Elles correspondent aux résultats d’une dégustation par un jury de consommateurs qui goûte une sélection de produits dont les marques payent pour faire partie. On y trouve par exemple des Curly Donuts ou un édulcorant sucré Daddy. Pas terrible pour la santé.
Qu’est-ce qu’on fait ?!
- On fait le tri avec le guide Le bon choix au supermarché (éditions Therry Souccar) ;
- On se penche sur l’enquête Main basse sur les fromages AOP de Véronique Richez (éditions Erick Bonnier) ;
- Et parce que l’appellation « bio » participe à caractériser une certaine qualité des produits, mais non leur traçabilité, le Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) a proposé en juin 2018 au Gouvernement, à l’Assemblée et au Sénat français, de faire évoluer ce label. Parmi les 18 propositions de ce rapport, le CESE préconise « d’expérimenter » un nouveau label : « agriculture biologique, locale et équitable » pour garantir la traçabilité des produits ;
- Si vous préférez le vidéo à la lecture, vous pouvez aussi revoir la séance du 19 Juin 2018 de l’Assemblée nationale, pendant laquelle l’état des lieux sur les Signes Officiels de Qualité et d’Origines (SIQO) des produits alimentaires permet aux membres du CESE de proposer un 6e label « bio et local » :