David Lacombled © Villa numeris
09/07/2019
Solidification en cours. Longtemps perçue comme gazeuse, l’économie sociale et solidaire passe de l’état liquide à l’état solide. Les consciences s’éveillent et les pratiques évoluent.
L’économie sociale et solidaire (ESS) regroupe les organisations privées, les entreprises comme les associations, qui ont pour ambition de concilier l’activité économique et l’équité sociale. Le secteur est par nature hétéroclite. La loi dite Hamon de 2014 avait la première institutionnalisée les initiatives reconnaissant ainsi leurs spécificités. Le Pacte de croissance de l’économie sociale et solidaire présenté par l’actuel gouvernement en novembre 2018 entendait proposer une stratégie globale de développement pour cette économie.
Toutes les organisations se revendiquant de l’économie sociale et solidaire ont pour point commun d’affirmer la primauté de l’homme sur le capital, de se reconnaître d’un même secteur économique avec ses principes propres, une notion forte d’un patrimoine collectif et impartageable et la volonté d’un service de la collectivité, d’intérêt général et d’une utilité sociale passant notamment par un ancrage territorial fort.
C’est qui le patron ? ! est l’entreprise la plus emblématique de cette dynamique. Se revendiquant comme la marque du consommateur, créée il y a peine trois ans, ses briques de lait se sont vite retrouvées dans les réfrigérateurs des foyers. Plus d’un sur dix dès la deuxième année. Authenticité et équité en sont les ingrédients du succès. Ce sont les consommateurs eux-mêmes qui établissent le cahier des charges du produit et en fixe le prix qu’ils sont prêts à dépenser pour un produit conforme à leurs attentes et une rémunération correcte des producteurs. Et ce prix n’est pas nécessairement le plus bas. Fort de ce succès, la marque s’étend désormais à d’autres produits.
«L’utopie a changé de camp» affirme Jean-Marc Borello en sous-titre de son dernier ouvrage «L’Entreprise doit changer le monde» (Débats Publics). Le président du groupe SOS dont la philosophie consiste «à partir de l’écoute du monde, à trouver le moyen concret de le transformer» considère que l’entreprise est la plus à même à «réconcilier l’intérêt individuel, l’intérêt collectif et l’intérêt général». En effet, il considère que «l’entreprise possède une capacité d’impact extraordinaire». Selon lui, «L’entreprise est l’acteur le plus capable de changer le monde parce qu’elle est le lieu où s’organise et se règle la confrontation permanente de l’intérêt collectif et de l’intérêt général».
Le numérique par sa capacité de co-création, de promotion virale et de recommandation de proche en proche offre naturellement des outils en parfaite adéquation avec les valeurs qui guident les ESS. Ce que souligne Jean-Marc Borello, «le client a pris une place prépondérante dans la stratégie des entreprises.» Aussi, «au fur et à mesure qu’on élève le niveau de conscience des citoyens du monde, on va accroître leur niveau d’exigence vis-à-vis de l’entreprise».
C’est ma raison d’être. Les entreprises l’ont bien compris. Leurs dirigeants n’ont plus que l’humanité au bord des lèvres. Au risque parfois de l’artifice de communication. Mais après tout, n’est pas une première étape rendant tout retour arrière impossible au risque de se faire démasquer. Il suffit de voir avec quel enthousiasme les entreprises entendent se doter d’une raison d’être dans la foulée de l’adoption la loi PACTE.
Si elles veulent rester un point d’attraction, pour leurs consommateurs comme pour leurs salariés, afin de les fidéliser et d’en recruter de nouveaux, les entreprises se doivent de donner sens et éthique à leur action. En cela, elles auront tout à gagner à observer comment éclosent aujourd’hui les initiatives de l’économie sociale et solidaire. »
David Lacombled, président de La Villa numeris.