OUEST FRANCE – Lait « équitable » : le consommateur dicte sa loi

« Les enseignes de distribution s’arrachent le lait « C’est qui le patron ?! », la marque des consommateurs qui préserve une marge bénéficiaire aux éleveurs. Un label de qualité.

Nicolas Chabanne, cofondateur de la marque « C'est qui le patron ?! ».
Nicolas Chabanne, cofondateur de la marque « C’est qui le patron ?! ». | DAVID ADÉMAS

 

27/02/2018

Toutes les enseignes s’arrachent cette petite brique de lait bleue. Après Carrefour, Intermarché, Cora, Auchan, Monoprix, c’est au tour de Leclerc d’accueillir dans ses magasins le lait « C’est qui le patron ?! ». Le distributeur spécialiste du « prix bas » a dû concéder des hausses de tarifs de dix-huit centimes d’euro par litre de lait. Car« ce lait rémunère à juste prix son producteur », comme le rappelle l’emballage de la marque des consommateurs.

Vendue 99 centimes, cette brique UHT permet aux producteurs de récupérer 39 centimes par litre au lieu de 30 à 32 centimes habituellement. « L’éleveur vend son lait au-dessus du coût de revient, en moyenne de 35 centimes le litre », explique Nicolas Chabanne, fondateur de « C’est qui le patron ?! ». Pour le consommateur, cet achat « équitable » ne représenterait qu’un surcoût de 4 à 5 € à l’année.

On boit moins de lait

Lancée à l’automne 2016, la marque a déjà écoulé 40 millions de litres de lait entier, écrémé, bio. Pour des briques de couleur bleue et désormais rouge ou verte. Le beurre et les yaourts vont suivre. La marque « C’est qui le patron ?! » s’appose désormais comme un label. Y compris sur du jus de pomme. « Nous comptons 1 200 magasins en rupture de stock.Mais, avec LSDH, la laiterie qui embouteille, nous disposons d’un potentiel de 130millions de litres répondant au cahier des charges. »

Car le lait doit être garanti sans OGM, avec des vaches qui pâturent. La démarche est loin d’être isolée. Intermarché annonce le lancement de la brique de lait « Les éleveurs vous disent merci ! », vendue à 88 centimes au consommateur avec un retour de 44 centimes au producteur. Mais Intermarché utilise sa… laiterie de Saint-Père-en-Retz (Loire-Atlantique).

« Attention à ne pas susciter la confusion chez les consommateurs », prévient Olivier Dauvers, spécialiste de la grande distribution. Car, avec la crise, des producteurs de lait n’ont pas attendu pour lancer leurs propres briques de lait « équitable ». Elles s’appellent « Laitik » en Bretagne, Coeur de Normandy en Normandie, Équilait dans la Sarthe, lait de pâturage, lait « Faire France »… Et à chaque fois, un minimum de 39 à 40 centimes ristournés aux producteurs.

Dans un marché en déclin (51 litres de lait par an et par habitant en 2015 contre 61 litres en 2003), « on assiste à une montée en gamme », explique Maud Marguet, de la Chambre régionale d’agriculture de Bretagne. « Il faudra sans doute passer par des cahiers des charges nationaux comme en Allemagne avec le lait de pâturage. »

Des industriels comme Bel cherchent déjà à généraliser le lait de pâturage et sans OGM. La Prospérité fermière Ingredia a établi un cahier des charges avec l’association environnementale WWF pour vendre du lait écoresponsable.

« Mais, si ça représente 10 à 15 % du marché d’ici cinq à dix ans, ce sera un carton absolu pour ce qui est des ventes, relativise Olivier Dauvers. Le lait équitable représente actuellement moins de 2 % du marché du lait de consommation. »

L’initiative n’est pas la réponse anticrise pour les 58 000 fermes laitières françaises. Sur les 24 milliards de litres de lait collectés en France, seuls 2,4 milliards sont embouteillés comme lait de consommation toutes marques confondues. »

Guillaume LEDU

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